RESUME
Après dix ans d'exil volontaire en Extrême-Orient, à la suite des événements de Mai 1968, l'ex-professeur Michel Rayan est de retour en France. Retour provoqué par le comportement extrémiste de son ex-élève et disciple Serge avec lequel il a toujours correspondu. Rien n'a vraiment changé dans le pays mais tout a évolué. Dans l'ombre cependant, quelques-uns refusent de se soumettre ou de jouer le jeu toléré par le pouvoir. Ils veulent briser le système en dénonçant la corruption et les compromissions quitte à employer la manière forte. Serge est de ceux-là mais il est abattu avant d'avoir revu Michel. Et son amie Francine décide tout naturellement de le venger. Rencontrant Michel dont la réputation n'est pas entamée, elle s'étonne de son fatalisme, de sa résignation. Michel refuse fermement de s'engager mais plusieurs concours de circonstances l'entraînent, malgré lui, dans un engrenage duquel il ne peut bientôt plus sortir. Ainsi est-il amené à lutter contre des députés véreux et certaines éminences grises proches du pouvoir. Contre les responsables d'un parti majoritaire et les polices officielles et parallèles. Contre des hommes d'affaires, enfin, pour qui l'argent et le profit sont les seules raisons de vivre. Michel et Francine agissent vite, frappent fort, confondent les intéressés et dénoncent les scandales. Mais traqués, ils finissent par payer de leur vie leur révolte suicidaire.
Copyright, 1995 CMC/Les Fiches du Cinéma
FICHE TECHNIQUE
Réalisateur : Jean-Pierre Mocky
Scénario : Jacques Dreux , Jean-Pierre Mocky
Collaborateur scénaristique Patrick Granier
Dialogues : Jacques Dreux
Société de production : Audiphone, M. Films (Paris)
Directeur de production : Robert Paillardon
Distributeur d'origine : L.M.D. Films Services
Directeur de la photographie : Marcel Weiss
Cadreur : Jacques Renoir
Ingénieur du son : Louis Hochet
Compositeur de la musique : Stéphane Varègues
Décorateur : Etienne Méry
Assistants-réalisateurs : Gaspard de Chavagnac,Jean-Paul Durand,Lê Lâm,Etienne Méry
Monteurs : Jean-Pierre Mocky, Catherine Renault
Script : Nathalie Perrey
Régie : Gérard Gaultier
Début du tournage : mai 1979
Sortie en France 17 octobre 1979
Durée : 90 mn
DISTRIBUTION
Jean-Pierre Mocky (Michel Rayan)
Catherine Leprince (Francine Vaneau)
Bruno Netter (Séverin Lanier)
Jacques Legras (le commissaire Roubert)
Lise Roy (Marie-Thérèse Foron)
Dominique Laurent (Sylvie)
Gérard Hoffman (Hoby)
Michel Francini (Romirec)
Lisa Livane (Aurélie)
Jean-Simon Prévost (Edmond Douany)
Robert Berri (le commissaire)
Dominique Zardi (le chef postier)
Francis Terzian (Moreau)
Jean Le Gall (Serac)
Patrick Granier (l'inspecteur)
Philippe Deplanche (Serge Lanier)
Pierre Gualdi (Fleury)
Katia Romanoff (la croqueuse de pommes)
Jean-Claude Romer (le pilleur de sébille)
Pierre-Marcel Ondher (l'Espagnol)
Germaine Lafaille (Soeur Elisabeth)
Bérangère Saleix (la pin-up du bateau)
Jean Abeillé (le gardien d'usine)
François Viaur (Arnaud)
Claude Pascadel (le piqueur de seins)
Johann Corbeau (Alexandre Marquis)
Sophie Moïse (l'étudiante du car de police)
Jacques Hébert (un ancien de mai 68)
Antoine Mayor (un ancien de mai 68)
Georges Lucas (le brigadier)
Jean-Pierre Clami (un homme dans la salle d'attente)
Luc Delhumeau (l'homme au chapeau de paille)
Jean-René Gossart (un automobiliste à l'alcootest)
Jean-François Dupas (un automobiliste à l'alcootest)
Jean-Claude Forestier (un automobiliste à l'alcootest)
Henri Attal (le gardien de la propriété Foron)
Youri Radionow (Monsieur Foron)
REPLIQUES
- Ici l'action révolutionnaire maximum c'est passer du pastis à la douane.
- "68 les barricades, aujourd'hui les pétitions mais alors dans 10 ans qu'est ce que vous allez faire chanter l'Ave Maria ?"
- Je ne crois plus à l'homme.
Mai 68 s'est terminé jusqu'au jour où les pompes à essence ont rouvert.
- Qu'est-ce qu'on t'apprend dans les casernes
- Tout ce qui est utile dans la vie : faire sauter une barraque, étrangler une sentinelle.
- Regardez les types qui passent, ils n'aiment que la bouffe et les combines.
C'est pas eux qui auraient pris la Bastille
- Ils marchent d'abord à quatre pattes, ensuite ils se redressent et ils vivent à plat ventre.
- C'est une habitude en politique, avant de tirer la sonnette d'alarme, on compte les électeurs.
AUTOUR DU FILM
- "Piège à cons" est le troisième volet d’une trilogie commencée avec Solo et L’Albatros en 1970 et 1971 à propos des évènements de mai 1968.
Après SOLO et L'ALBATROS, LE PIÈGE A CONS est le troisième volet du style "thriller" adopté par Jean-Pierre Mocky pour traiter de son époque et de ses problèmes. Depuis SOLO, dix ans ont passé. La physionomie du pays a changé comme la mentalité des jeunes. Aujourd'hui, le personnage actif et principal est une femme. Réalisé en vingt-cinq jours, avec un budget modeste et beaucoup de ténacité par tous les participants, LE PIÈGE A CONS suggère à Jacques Siclier cette réflexion : "Mocky n'a pas son pareil pour diriger, en faisant rire, sa caméra sur les tares de la société. Cette satire est menée tambour battant à la manière d'un thriller. Avec son feutre et son imperméable noir, Mocky apparaît comme une des dernières figures romantiques du cinéma français, comme un superbe et confortant anachronisme." (In "Télérama".)
- Pou Mocky, le personnage du film est comme la résurrection du héros romantique qui meurt à la fin de Solo : "il ressuscite sous la forme d'un professeur, théoricien politique de 68, qui s'est exilé en Indonésie. Quand il rentre en France, le socialisme à la Mitterrand est en marche. Il est confronté à une arrière-garde, un dernier carré de terroristes fatigués et une nouvelle vague de jeunes qui ne veulent plus poser de bombes mais changer la vie avec la force tranquille d'un socialisme repeint à neuf."
CRITIQUES
Mon avis
Dans la droite lignée de Solo et L'albatros, le piège à cons est tout aussi réussi et figure incontestablement parmi les plus grands films de Mocky. Il reprend son personnage d'ex soixante-huitard (Michel Rayan) , ex professeur d'université, avec imper et chapeau, qui revient en France, après dix ans passés à Djakarta à travailler dans une exploitation forestière. A la suite de la mort d'un de ses anciens élèves tué par un jeune flic, il va se retrouver entraîner avec la petite amie de ce dernier dans la lutte contre le système politique en place, plus particulèrement le financement des partis politiques (ici le RPP, proche du RPR !) qui acceptent des pots de vin pour alimenter leur caisse noire. Pour financer les éléctions, ils sont conduits à accepter de l'argent de grands groupes industriels et autres avec en échange des permis de construction d'usines polluantes par exemple. Michel Rayan est à la fois poursuivi par la service de sécurité du parti politique et par les vrais flics. Il se rend compte qu'en dix ans rien n'a changé, la société est toujours aussi gangrénée par les corruptions et les magouilles. Le film bénéficie de très bons dialogues désabusés plein d'ironie mordante et ne souffre pas trop d'avoir disposé d'un petit budget et d'un temps de tournage toujours très court chez Mocky. La dénonciation des politiques combinards est menée comme un thriller haletant, accumlulant les courses poursuites. Les grèves et le son des slogans des grévistes ponctuent tout le film, notamment "un "35 heures, pas de chômeurs", qui montre combien les revendications, datant depuis 1979, se révèlent tout à fait illusoires une fois mis en application bien plus tard. Le constat est très amer, avec le recul, montrant l'inefficacité de toute mesure adoptée, incapable à enrayer les maux de la société qui subsisteront toujours.
Aux côtés de Mocky, le personnage féminin de Francine Vaneau est remarquablement écrit et interprété par Catherine Leprince. Elle travaille au sein de la permanence du parti et va s'acharner à révéler au grand jour les agissements des politiques qu'elle cotoie, motivé par le dégoût et la colère, et désirant venger la mort de son ami. C'est pour elle, chat éploré, que Mocky / Michel Ryan va replonger malgré lui dans l'affrontement avec flics et politiques. Catherine Leprince n'aura pas eu la carrière qu' elle méritait au cinéma (démarré avec Bilitis de David Hamilton, on l'aura vu dans Le cavaleur, le choc avec Delon, Escalier C, Vive les femmes, Paulette la pauvre petite milliardaire et quelques téléfilms) remercions Mocky de lui avoir donné son plus beau rôle.
Autres critiques
"Thriller à l'américaine, romantisme désenchanté, humour grinçant; ce film est le tableau très sombre de la France d'avant 81 avec ses magouilles politiques, ses élections truquées, ses chômeurs qui s'embourgeoisent. Un film féroce et désabusé."
Claude Bouniq-Mercier - Guide des films Jean Tulard
"Du Mocky pur sucre, vaguement bâclé (ça fiche en rogne Mocky quand on l'écrit, mais c'est vrai). En compensation, on a droit à de la mélancolie et de la dérision, à un délire de poursuites sanglantes. Film d'amour et d'anarchie, qui ôte le masque des visages. Des trublions comme lui font un bien fou."
Pierre Murat - Télérama.
"Dans Le Piège à cons, Mocky considère avec un détachement amer la fin des illusions révolutionnaires et la pérénnité d'une société fondée sur le mensonge et l'escroquerie. Jamais, chez Mocky, la nostalgie n'oblitère la lucidité."
Encyclopédie Le cinéma - Editions Atlas.
"Un Mocky comme souvent dénonciateur, à l’affût du politique et de la jeunesse contestataire mais cette fois dans un monde corrompu, sclérosé et où toute tentative de rebellion semble vaine et inutile. Situant l’action dix ans après mai 1968 et au milieu de la crise pétrolière des années 70, Mocky filme la fin d’une époque, la fin des espérances en un monde meilleur et un retour à la case départ avec manifs, grèves et jeunes en colère.
Si ce film reste très actuel sur le fond (surtout au vu de la situation liée aux manifs anti CPE), il est impossible de le voir de la même manière que lors de sa sortie et le regard qu’on pose dessus est devenu plus pessimiste et plus noir encore. Le leitmotiv des grévistes, « 35 heures plus aucun chomeur », nous ramenant automatiquement à la réalité avec une ironie assez grinçante. Les 35 heures ont beau être entrées en vigueur 25 ans plus tard, (le film atteste de la lenteur du gouvernement car même 14 ans de gauche mittérandienne n’auront pas permi de répondre aux réclamations ouvrières), on contaste qu’au final la situation politique et économique n’a pas évolué d’un pouce. Inutilité et utopie des revendications qui semblent aujourd'hui nous montrer que dans un système comme le notre toute solution est vaine et se soldera par un échec.
Mocky l’anarchiste met ici tous les partis politiques dans un même sac, inaptes à protéger le peuple et tout juste bon à défendre leurs privilèges par n’importe quel moyen, et manifeste son dégoût de la manière la plus extrême : violence, tueries, innocence perdue, libertés évanouies. La scène finale (dont nous ne dévoilerons rien) nous montre avec brio que si certains individus possèdent encore une dose d’humanité, c'est l’absolutisme qui prime dans notre société. Mais Mocky n’est pas anarchiste que dans le fond, la forme suit avec une mise en scène qui sort des codes traditionnels mais qui tient la route et un traitement du son magnifique : les manifestants sont le plus souvent invisibles, tels des fantômes dont la voix seule nous parvient et nous hante tout en passant à côté des oreilles de ceux à qui elle s’adresse."
Nicolas Thys - Ecranlarge 21/03/2006
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Reportage sur le tournage à Rouen
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