RESUME
C'est la fête à Litan, petite cité montagneuse et brumeuse. C'est le carnaval, les musiciens sont masqués, les scouts ont organisé des jeux de piste dans les grottes près du cimetière, des forains s'exhibent sur la place. Nora a le sommeil agité par un rêve étrange et terrifiant. A son réveil, une voix mystérieuse lui donne rendez-vous au téléphone. Commence alors une folle poursuite à travers le village, une délirante cascade d'aventures, au cours de laquelle Nora va revivre tous les points forts de son cauchemar. Un scout, Eric, est laissé pour mort. Le respectable docteur Julien est un savant dément qui, à l'abri de son laboratoire, réveille le corps d'Eric pour sauver sa femme. Jock, l'ami de Nora, est soupçonné d'assassinat. Les fous de l'hôpital s'échappent. La police se trompe de criminel. Le cimetière s'effondre et les cercueils s'en vont au fil de l'eau. Et l'eau à Litan recèle d'étranges "spectres vers", vers luisants qui attaquent et désagrègent instantanément les humains à leur portée. Une étrange folie s'empare des habitants qui, les uns après les autres, perdent le regard et le sens commun. L'amour lui-même ne pourra arrêter le cataclysme.
Copyright, 1995 CMC/Les Fiches du Cinéma
FICHE TECHNIQUE
Réalisateur : Jean-Pierre Mocky
Scénario : Suzy Baker,Patrick Granier,Jean-Pierre Mocky,Jean-Claude Romer
Sociétés de production : Films A2,M. Films (Paris)
Directeur de production : Pierre Hanin
Distributeurs d'origine : Coline Films, L.M.D. Films Services, Oceanic Films
Directeur de la photographie : Edmond Richard
Ingénieurs du son : Luc Perini, Gilles Thomas
Compositeurs de la musique : Dimitri Chostakovitch, Nino Ferrer
Décorateur: René-Yves Bouty
Assistants-réalisateurs : André Barbier,Philippe Besnier,Olivia Caplain,Christophe David,Etienne Méry,Nicole Molion,Jean-François Villemer
Monteurs : Jean-Pierre Mocky,Catherine Renault
Effets spéciaux : Michel François
Genre : Fantastique, Horreur
Durée : 88 minutes
Sortie France : 24 Février 1982
DISTRIBUTION
Marie-José Nat (Nora)
Jean-Pierre Mocky (Jock)
Nino Ferrer (Dr. Julien)
Marysa Mocky (Mlle Servais)
Roger Lumont (Le commissaire Bolek)
Micha Bayard (Mme Mirral)
Bill Dunn (Cornel)
Sophie Edelman (Mlle Bohr)
Patrick Granier (policier)
Terence Montagne (Eric Bohr)
Sophie Moyse (femme à la mairie)
Jean-Claude Remoleux (Thiraudet)
Katia Romanoff (Mme Cornel)
Jean-Claude Romer (policier)
François Toumarkine (chef des cochons)
Sylvie Vieille (femme à la mairie)
Georges Wod (Bohr)
Dominique Zardi (chef des fous)
AUTOUR DU FILM
Prix de la critique au Festival International du Film Fantastique (Avoriaz) en 1982.
Nombre total d'entrées en fin d'exclusivité (Paris) : 16443
Le scénario du film est dû à une collaboration entre le réalisateur, Jean-Claude Romer, responsable des questions, et du choix des films diffusés à " Mardi Cinéma ", aussi figure incontournable du fantastique, rédacteur en chef de Midi Minuit Fantastique (dans LITAN, il fait une apparition en policier), Patrick Granier, co-scénariste du PIÈGE A CONS et Scott Baker, écrivain américain de Science-Fiction.
Marysa Mocky est la femme de Jean-Pierre Mocky. Parmi les familiers, outre Remoleux, on reconnaît Dominique Zardi, chef des fous, et Pierre-Marcel Onder, programmateur radio à France-Musique.
LITAN a été tourné à Annonay (Ardèche) et dans ses environs.
" Cela faisait longtemps que j'avais envie de faire un film fantastique, dit Jean-Pierre Mocky. Depuis exactement quarante ans, lorsqu'enfant j'étais terrifié par les masques de mort dont s'affublaient les gens de chez moi, là-bas, en Slovénie. "
« Pour moi, le fantastique c’est tout simplement du rêve, comme celui que l’on peut faire n’importe quelle nuit. Lorsque j’ai décidé de faire Litan, j’ai voulu que ce soit un rêve angoissant et irrationnel, mais dont tous les détails, filmés, permettaient de faire une synthèse. L’horreur des tronçonneuses, des viols sanglants ou des tortures sadiques, le sang pour le sang, je le laisse aux autres. Puissent certains entrer dans mon rêve et y trouver un plaisir angoissé et fugitif. Parmi les brumes d’une cité montagneuse, peuplée de personnages singuliers, en une seule journée, de l’hôpital à la tannerie, et du cimetière aux grottes souterraines, l’amour le disputera à la mort, et l’insolite à la terreur. En ce jour de fête, un couple, Jock et Nora, va se retrouver soudain précipité dans une délirante cascade d’aventures surprenantes où le cauchemar se substitue inexorablement à la réalité… » (Jean-Pierre Mocky).
"Litan, c'est le film que j'ai aimé parce que il y avait des décors, il y avait l'idée de la mort, des feu follets dans les cimetières. C'était quelque chose qui me faisait rêver quand j'étais petit, et c'est le seul film qui reflète bien mon enfance. Dans l'Est, on faisait peur aux enfants avec des masques. C'était pas loin d'Halloween. Les paysans se déchaînaient. Il n’y avait pas de citrouilles mais des sorciers avec des masques horribles. Les enfants avaient peur de ça. Quand ils n'étaient pas gentils, on leur disait qu'ils allaient revenir. Et puis, c'est un film flamboyant, un peu gothique. Dans le fantastique, on peut se livrer à un tas de facéties. Je me rappelle que j'ai failli me battre avec John Boorman parce qu'il n'aimait pas le film. Boorman avait hué pendant la distribution des prix quand Jeanne Moreau avait annoncé que j'avais gagné. Lautner, qui est un brave gars, était dans le jury aussi, il a attrapé Boorman et lui a dit : "Espèce de salaud, c'est un confrère !" . Boorman était assis à côté de Brian De Palma, et ils se sont foutus de mon film au moment où j'ai eu le prix. Et c'est là où je me suis rendu compte que le film était intéressant dans la mesure où il n'était pas dans le style de leurs films. Parce que eux travaillaient dans quelque chose de classique et Litan n'était pas classique parce qu'il venait de l'Est. C'était le choc entre l'Est et l'Ouest sur le fantastique. Ils ont regardé mon film avec une haine comme s'ils regrettaient de ne pas faire ça. Ils ne pouvaient pas sacrifier à des lois du genre que je n'ai pas respectées. Ils se sont dit que j'avais réussi à visualiser quelque chose de mon enfance que eux, ne pourraient pas faire parce que ça risquerait de ne pas marcher financièrement. Ils ont peut-être beaucoup plus de possibilités mais ils les canalisent pour pouvoir être dans le show-business. ils se contrôlent terriblement. Donc, ils ne peuvent pas avoir la même inspiration que moi, parce que moi, je m'en fous, je peux faire ce que je veux !
(Jean-Pierre Mocky - Entretien réalisé pour l'émission de cinéma Désaxés et diffusée sur Radio Libertaire le 9 Novembre 2003).
CRITIQUES
Mon avis
Litan montre un versant moins connu de Mocky, son goût du fantastique et de l'étrange. Il y excelle avec ce film qui utilise les gueules chères à Mocky, non à des fin comiques et satiriques mais pour générer un climat de cauchemar éveillé. Les décors de la ville d'Annonnay (tanneries, passerelles au-dessus du torrent, les grottes) sont très bien exploités et participent à créer une atmosphère irréelle et proprement angoissante. A la Saint Litan, tout le monde peut porter un masque et cela plonge la ville dans un climat des plus insolites, noyé dans une brume persistante. Les morts bizarres vont vite s'accumuler, tous les habitants vont se retrouver posséder par les âmes des morts, qui vont se reflèter dans leurs yeux. Les effets spéciaux, pour rudimentaires qu'ils soient, représentent cette prise de possession par des "spectres vers", véritables vers luisants qui désintégrent les corps humains plongés dans l'eau. Les films fantastiques sont rares dans le cinéma français et Litan fait figure de chef d'oeuvre dans le genre. Mocky a été récompensé pour la seule et unique fois de sa vie par un grand prix du Jury au festival d'Avoriaz. On fait souvent le reproche à Mocky de bacler ses films, mais ici au contraire le film est constamment maitrisé, surprenant et original. Les esprits rationnels feront la fine bouche mais Mocky a laissé des zones d'ombre pour justement laisser libre cours à l'imaginaire du spectateur.
Autres critiques
"Dans les superbes décors naturels d'Annonay, la course-poursuite du couple Nora/Jock face à l'irrationnel ne manque ni de panache ni d'attrait... Et pourtant, malgré certaines scènes remarquables, il manque ce déclic vers le rêve, la folie et l'imaginaire .... Une bonne surprise, toutefois ..... "
Cinefiches
"Cinéaste définitivement fâché avec les conventions, Jean-Pierre Mocky s’est également montré très enthousiaste avec le fantastique. En 1981, il quitte les brûlots anticléricaux, satiriques et véhéments et met en scène Litan, une sorte de Dead can dance fascinant, montrant un couple de passage dans une ville étrange où l’on célèbre les morts. Sorti en même temps que son Y a-t-il un français dans la salle ?, fable politique qui prenait (déjà) la forme d’un film choral pour révéler les névroses secrètes de monstres ordinaires, ce beau petit film fantastique ne semble pas prendre au sérieux le bazar de la série B et préfère s’amuser avec ses personnages complètement fous. On est constamment au bord du Grand Guignol, mais l’honnêteté de l’ensemble et la puissance atmosphérique sont des atouts de poids."
Romain Le Vern - Avoir-alire.com
"Poème glauque et grotesque, constamment sur le fil du risible ou du sublime, avec cette notion de risque à chaque instant, Litan est une œuvre de funambule. Un voyage au pays des limbes et des songes avec ce qu’il faut comme effets visuels et de personnages bizarres pour susciter un sentiment d’insécurité.
Certes, l’atmosphère prime régulièrement sur l’intrigue plutôt ténue, mais cette réserve accessoire n’altère que partiellement une œuvre d’artiste résolument hors des normes et plutôt gonflée pour l’époque"
Romain Le Vern - Dvdrama.com
"Ce film de Jean-Pierre Mocky, tourné en 1981, est une des rares tentatives réussies de faire du fantastique dans le cinéma français. Une galerie de personnages tétanisés hantent cet univers montagnard brumeux, une folie inexpliquée s'emparant des villageois (Jean-Claude Rémoleux immobile, Roger Lumont en commissaire borné, Dominique Zardi en chef des fous...).
Mocky a toujours un sens des décors hallucinants, ou du contre-emploi (Nino Ferrer en scientifique fou). Il faut saluer ce climat d'angoisse (les cercueils flottants, le carnaval des fous) accompagnant les deux fugitifs joués par Marie-José Nat et Mocky en personne. Une réussite du genre."
Coinducinephage
"La science-fiction américaine, le gothique anglo-belge et l'épouvante des Carpathes rassemblés au coeur de la France profonde par le plus casse-cou des cinéastes. Bilan: un film d'atmosphère à rêver debout, un canular logique, magique et fou. Il faut voir Litan...même pour ne pas y croire."
Philippe Colin (Elle).
Article "A propos de Litan" - Propos recueillis par gilles Dagneau (mars 1982) revue cinema 82 - N°280
VIDEOS
Bande-annonce
Making-of inédit de 26 minutes, diffusé sur Antenne 2
AFFICHES
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